mercredi 26 septembre 2012

US. TV. "Homeland". Jack Bauer version Obama ?




"Homeland" vient de détrôner "Mad Men" aux Emmy Awards en empochant le titre de la meilleure série dramatique (l'équivalent de l'Oscar du meilleur film mais version séries). Pour ceux qui ne suivent pas l'actu, "Homeland" est une série lancée en 2011 sur Showtime, grande concurrente de HBO et dont on connait, et apprécie, en France les séries "Weeds", "Dexter" ou "Californication". Alors qu'"Homeland" s'apprête à inaugurer sa deuxième saison fin septembre 2012, Canal Plus a elle commencé au début de ce même mois la diffusion de la première saison.



"Homeland" (tout comme "In treatment") est l'adaptation d'une série israélienne. Mais la connotation politique est bien plus forte ici, puisque la série a pour sujet principal la menace islamique sur le territoire national (le fameux homeland du titre). Et forcément quand on pense à danger islamique dans le monde des séries, on pense à Jack Bauer, le héros de "24", modèle du héros sévèrement burné, qui vous remet un terroriste à sa place à coup de tatanes et avec une petite dose de torture si nécessaire. Jack Bauer a eu sans nulle doute un rôle important pour faire passer la pilule Guantanamo à l'opinion pendant le règne Bush. Pour lutter contre le terrorisme tout serait donc permis ?

Après les années de certitude, les années de doute auraient donc suivies. Bon faut pas déconner non plus, Guantanamo est toujours ouvert, et les USA organisent des attaquées ciblées au Pakistan via des drones pilotés par la CIA afin de décapiter Al-Quaïda (quitte à éliminer quelques civils au passage). Bref, face au terrorisme, il est encore à démontrer que l'administration Obama fasse plus dans le détail que l'administration Bush.

Et justement le "héros" d'Homeland, Nicholas Brody, sergent dans les marines, et tout juste libéré après avoir passé sept ans en otage en Irak, pourrait bien être passé à l'ennemi en réaction à l'attitude américaine. Mais ça, en fait on n'en est pas très sûr (et c'est le coeur de l'intrigue de la série). Contrairement à Carrie Mathison, agent à la CIA, atteinte de graves troubles psychologiques qu'elle a toujours réussi à cacher à sa hiérarchie, mais qui soudainement s'acharne sur Brody, sans raison apparente, au point d'installer illégalement des caméras dans sa maison.

Brody et Mathison sont les personnages principaux du téléfilm, mais ne sont pas des héros pour autant. Ils ont chacun leurs failles, et il est difficile d'être  à 100% derrière eux, et de les trouver vraiment sympathiques (et ça c'est pour moi la principale originalité de la série - car contrairement à des personnages comme Jack Bauer ou même Tony Soprano, on ne rentre jamais vraiment dans la psyché de Brody et on ne peut donc juger vraiment de ses convictions et de son objectif). Aucun des deux protagonistes n'est non plus en posture apparente de sauver le monde.

Dans "Homeland", le terrorisme a un visage plus humain et menaçant (pour les occidentaux) puisqu'interne via des héros de guerre, mais il n'en reste pas moins que la vision très basique de l'islamisme n'a guère évolué depuis "24". Les islamistes sont toujours montrés comme des dangereux extrémistes manipulateurs et prêts à tout pour annihiler le démon américain. Et le pouvoir américain corrompu n'est guère épargné. Bref le bon américain de base a toujours deux ennemis : les terroristes et le gouvernement central (le premier étant quand même pire que le second).

Et rien ne dit (à la fin de la saison 1) que Brody ne soit dans une quête de purification du système sur le modèle d'un Jack Bauer.

Bref, "Homeland" ne révolutionne pas dans le fond la vision américaine du terrorisme et de l'islamisme. Les USA ont-ils vraiment changé sur le sujet depuis Jack Bauer ? Rien n'est moins sûr. Il ne révolutionne pas non plus le monde des séries, mais profite de la lassitude engrangée par une cinquième saison très moyenne de "Mad Men" et un manque de prétendants sérieux.

Peut-être que la deuxième saison, qui va bientôt démarrer aux US, démentira mes impressions mitigées face à cette première saison, mais je ne pense pas que la série puisse être autre chose qu'un "24" light (avec nettement moins d'action et plus de psychologie).

Saison 1. 12 épisodes de 60 mn


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